(paru dans Ouest-France le 11 septembre 2010)Par Marc LE FUR, Député des Côtes d’Armor,
Vice-président de l’Assemblée nationale
Lorsque la Politique Agricole Commune a été créée, elle était étudiée pour répondre à une logique de développement et à un marché dont on connaissait les comportements. Les éleveurs laitiers savaient qu’ils pouvaient compter sur un revenu modeste mais quasiment garanti ; les éleveurs de porcs connaissaient quant à eux leurs contraintes liées au cycle du porc et menaient leur trésorerie en fonction.
Le marché s’est mondialisé et connaît des crises immaitrisables. La PAC s’est-elle adaptée à cette évolution inconnue et imprévisible de l’environnement économique ? Non. La lourdeur de cette politique commune nous conduit aujourd’hui à des paradoxes intolérables. En pleine flambée des prix des céréales, la PAC continue à donner des primes aux céréaliers dont les prix sont très rémunérateurs alors qu’elle délaisse des éleveurs qui auraient besoin de primes pour palier l’explosion du coût de l’aliment sans augmentation des prix.
Pour réguler, ne faudrait-il pas que l’Union européenne plafonne ces aides afin qu’à partir d’une somme, 100 000 euros par exemple, celles-ci bénéficient à d’autres ? La Reine d’Angleterre bénéficie d’un millions d’euros d’aides de la PAC pour ses seules terres d’Angleterre, sans l’Ecosse !
Nous devons constater l’inaptitude de l’Europe à s’adapter aux circonstances. Aujourd’hui, l’Europe maintient ces aides aux céréaliers alors que le prix des céréales a rarement été aussi élevé et laisse les éleveurs s’enfoncer dans la crise. L’Union européenne ressemble de plus en plus à sa caricature : un dinosaure dont les mouvements sont de plus en plus lents alors que l’évolution de l’environnement économique mondial nécessiterait agilité et rapidité.
L’Europe agricole a avant tout besoin de régulation, mais qu’est-ce que la régulation si ce n’est l’adaptation aux circonstances ? Les Etats-Unis sont beaucoup plus réactifs et régulent avec beaucoup plus de talent. Il faut que l’Europe régule ses marchés agricoles en s’adaptant rapidement à des cycles économiques de plus en plus brefs et désordonnés. Or, aujourd’hui, l’Europe, trop lourde, ne le fait pas. Paradoxalement, ce sont les Etats Nations qui doivent inventer des dispositifs fiscaux destinés à réguler les cycles économiques agricoles. Or, ce n’est pas le rôle de la fiscalité des Etats-Nations qui, au contraire, devrait être la plus stable possible pour répondre aux exigences de la monnaie unique.
La Politique Agricole Commune ne pourrait-elle pas se doter, dans un cadre financier constant, de fonds d’intervention qui lui permettraient d’éteindre un incendie économique avant que celui-ci ne prenne des dimensions ingérables ?
L’Europe a également besoin d’une régulation intérieure car elle ne maîtrise pas de nombreuses distorsions de concurrence, notamment entre la France et l’Allemagne, quant aux normes environnementales, au droit du travail ou à la fiscalité. Elle doit faire cesser cette concurrence déloyale qui handicape nos éleveurs et notre industrie agro-alimentaire.
Il faut changer cela. Cela implique de prendre à bras le corps la question de la refonte de la PAC. Dans le même esprit, le Président de la République veut, avec raison, mettre à l’ordre du jour du G20, le gouvernement du monde, la question des prix des matières premières et de leur nécessaire régulation. La question des matières premières ne peut être laissée aux seules spéculations et tradeurs.
Mon cher Marc , ce que tu viens de démontrer est d’une grande justesse et d’une clarté indiscutable. Il faut impérativement que l’Europe soit bien plus réactive .
Le fur
A chaque fois que ça pu sur une plage, je pense à toi