Financement du Referundum sur le projet de traité constitutionnel
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues,
je me contenterai dévoquer deux lignes particulières de ce collectif, et dabord celle qui a trait au financement du référendum qui permettra aux Français de trancher le débat majeur de la Constitution européenne. Je me limiterai à cette tribune à laspect financier de cette question. Mais, comme on le verra, on aborde à travers ce prisme des enjeux essentiels, politiques au sens le plus noble du terme.
Une campagne référendaire est loccasion dinformer les Français dune manière exhaustive et pluraliste. Le collectif a prévu un crédit de 39,3 millions euros, qui sajoutent aux 25 millions deuros prévus en loi de finances initiale. Ce sont donc au total 64,3 millions deuros qui sont prévus au titre de la campagne officielle, qui relève du ministère de lintérieur.
À quoi va servir cet argent, telle est la question. Lessentiel de la dépense doit servir à financer ce quon a improprement appelé la « propagande officielle » – il vaudrait mieux parler dinformation électorale – adressée aux électeurs : il sagit denvoyer 42 millions de plis. Ces documents doivent comporter, outre les bulletins de vote, cela va de soi, le texte de la Constitution. Se pose alors la question du format, sachant que le format « Journal officiel », qui fut retenu pour le traité de Maastricht, est répétitif et à peu près illisible.
Le deuxième problème, plus complexe, concerne les protocoles annexés au traité, qui sont extrêmement nombreux.
Certains ont peu dintérêt pour nous – le statut du Groenland, par exemple. Dautres en revanche sont essentiels : ainsi le protocole n° 1, qui traite du rôle des parlements nationaux ; le protocole n° 2, concernant le principe de subsidiarité ; le protocole n° 6, qui a trait au siège des instances européennes. Je vous rappelle quen droit international les protocoles ont la valeur du traité.
Cest dire combien est essentielle la question de savoir si ces protocoles doivent être adressés au décideur, le citoyen en loccurrence. Le problème est que ces protocoles représentent 430 pages, au vu du document que nous a préparé notre collègue Pierre Lequiller. Soit nous respectons la logique juridique et nous les joignons aux autres documents ; soit nous ne le faisons pas, et nous risquons de réduire abusivement linformation du décideur ultime, qui est le citoyen.
La deuxième question qui se pose à propos du contenu de ces plis est celle de savoir sils doivent contenir des commentaires, notamment des partis politiques, comme les professions de foi des candidats à une élection. Je vous rappelle, mes chers collègues, que, selon larticle 4 de la Constitution, les partis concourent à lexpression du suffrage. Leur rôle dans cette affaire a été reconnu par le Président de la République lui-même, qui a salué la récente décision du parti socialiste.
Comment permettre cette expression des partis politiques ? Il semblerait logique que figurent dans le document les opinions diverses de plusieurs partis, et pas seulement de ceux qui sont représentés dans cette assemblée. Il faudrait élargir le champ à ceux qui siègent au Parlement européen. On pourrait me rétorquer quaucun commentaire navait été joint aux documents concernant le référendum sur Maastricht et celui sur le quinquennat, mais ce dernier navait pas eu la portée populaire que lon pressent pour celui de lannée prochaine. Pour Maastricht, la situation était totalement différente : en 1992, il ny avait pas de règle de financement des partis politiques ; ce nest arrivé quen 1993. Nous avons maintenant un corpus de règles, qui présente parfois des avantages, mais qui condamne les partis politiques à ne vivre que de fonds publics. Sans fonds publics, comment pourraient-ils concourir à lexpression du suffrage sur ce référendum ? Il faut que les opinions diverses, le oui comme le non, puissent sexprimer. Peut-on, pour cela, imaginer un autre vecteur que les partis ? La question qui est posée est donc celle du financement de la vie politique. Nous avons un système parfaitement prévu pour la démocratie représentative : les candidats et les élus génèrent de la dépense, mais aussi de la recette. En revanche, rien nest prévu pour financer la démocratie directe. Ce référendum est loccasion de fixer les règles dun tel financement. Lattachement de nombre dentre nous à la démocratie directe doit nous inciter à répondre clairement à ces questions.
Autre poste de dépense : lenvoi des documents. Le poids de chaque pli dépassant cent grammes, nous ne sommes plus dans le cadre du monopole de La Poste. Un appel doffres européen a donc été lancé, en toute logique, dailleurs. Comment solliciter les électeurs sur une affaire européenne sans respecter les règles européennes ? Lancé le 2 décembre, cet appel doffres suit son cours. Paradoxalement, la Bundespost pourrait parfaitement y répondre,mais La Poste sera certainement la mieux placée. En tout état de cause, cet appel doffres conditionne le calendrier puisquil ne sera définitivement clos que début mai au plus tôt. Comme la dit un très haut fonctionnaire, le code des marchés publics tient la démocratie en létat !
Pour envoyer à chacun des Français un document identique, il ne sera pas nécessaire de passer par les préfectures, comme on le fait dhabitude pour les élections. Cest un routeur qui diffusera ce même document, ce qui permettra de réaliser des économies. Mais cela posera un problème de principe puisque, pour faire un envoi unique, il faut un fichier électoral unique, que nous devrons constituer puisquil nexiste pas.
Outre la campagne officielle, une information civique devra être diffusée. À cet égard, 10 millions deuros figurent au budget du ministère des affaires étrangères, dont 5 millions au titre du collectif, pour les supports dinformation : brochures ou numéro vert. Cette information doit être pédagogique mais neutre, comme la récemment rappelé le président Mazeaud. Elle doit permettre déclairer nos concitoyens sans devenir une campagne en faveur dune option du référendum.
Sur ces questions relatives au référendum, monsieur le ministre, je souhaiterais que vous puissiez nous éclairer.