M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements portant articles additionnels après l’article 59.
Je suis d’abord saisi d’un amendement n° 157, qui fait l’objet de plusieurs sous-amendements.
La parole est à M. Michel Barnier, ministre de l’agriculture.
M. Michel Barnier, ministre de l’agriculture. Cet amendement traite de la réforme du service public de l’équarrissage.
L’évolution favorable de la situation sanitaire des troupeaux confrontés à l’encéphalopathie spongiforme bovine, l’ESB, a permis à l’État d’entamer, en 2005, une réforme de l’équarrissage qui doit progressivement permettre aux filières animales d’assurer la gestion des déchets liés à leurs activités selon le principe « pollueur-payeur ».
En octobre 2005, la gestion des déchets d’abattoirs a été transférée aux abatteurs, avant celle des déchets de boucherie et d’atelier de découpe, en 2006. Une nouvelle étape doit logiquement être franchie maintenant pour ce qui concerne la gestion des animaux morts sur les exploitations.
L’amendement n° 157 propose, tout d’abord, de ne pas maintenir le service public pour les animaux trouvés morts dans les exploitations métropolitaines. Le service sera maintenu pour les animaux trouvés morts sur la voie publique et pour l’Outre-mer. Ensuite, l’amendement prévoit de maintenir, dans l’attente d’une organisation complète des filières pour prendre en charge le coût de collecte et de traitement des animaux morts en exploitation, la possibilité de prélever la taxe d’abattage au profit de l’office chargé de l’élevage. Enfin, il précise les obligations des éleveurs afin de préserver la qualité sanitaire du système actuel.
La prise en charge de l’organisation de l’équarrissage par les filières – préférée au système des marchés publics – permettra, d’une part, une négociation directe des prix avec les équarisseurs, et, d’autre part, une possibilité de récupération de la TVA. Comme dans les deux premières étapes de la réforme, le coût global de l’équarrissage devrait diminuer d’environ 25 % – la baisse a même atteint 30 % pour le transfert de la gestion des déchets aux abatteurs.
En dehors de l’outre-mer qui n’est pas concerné par cette libéralisation, les professionnels sont préparés. Nous avons mené avec eux une longue concertation, fructueuse et constructive.
M. le président. Je suis saisi de trois sous-amendements, nos 200, 206 rectifié et 201 rectifié, présentés par M. Le Fur, qui peuvent faire l’objet d’une présentation commune.
La parole est à M. Marc Le Fur.
M. Marc Le Fur. Le problème de l’équarrissage se pose en termes économiques et sanitaires. Monsieur le ministre, je veux saluer votre travail, et celui de votre équipe, sur le sujet.
Avant la grande crise de l’ESB de 1997, le service public de l’équarrissage s’autofinançait : ceux qui ramassaient les cadavres s’en servaient pour financer le coût de l’équarrissage. Mais la crise de l’ESB a supprimé cette recette : l’équarrissage n’était plus qu’un coût.
Depuis, l’État a multiplié les expédients, et, tous les ans, chaque ministre se trouvait, avec nous, confronté à ce problème qui persiste aujourd’hui, malgré la sortie de la crise sanitaire.
Puisque le problème des déchets d’abattoirs est désormais réglé – leur gestion a été confié aux abatteurs –, reste à résoudre celui des animaux morts dans les exploitations. Il n’est pas question de faire payer exagérément les agriculteurs concernés car, certains, en particulier en période de crise, pourraient être tentés d’enterrer les cadavres dans un champ après les avoir recouverts de chaux, ce qui créerait un problème sanitaire majeur.
Il n’est pas, non plus, question d’en rester au statu quo en matière de coûts d’équarrissage. En effet, seules deux grandes entreprises étrangères proposent leurs services en la matière. Elles sont certes sérieuses, mais elles exercent, de fait, une sorte de duopole. L’apparition de nouveaux partenaires doit donc être favorisée, ce que permettent mes sous-amendements.
La meilleure collecte possible des cadavres d’animaux doit, d’une manière ou d’une autre, être assurée. Il faut tenir compte du fait que les coûts de cette collecte peuvent être très différents d’une région à l’autre, mais veiller à ne pas pénaliser, a contrario, les zones d’élevage dense, car si elles sont favorisées en termes de coût, elles sont aussi soumises à la concurrence de pays comme le Danemark ou les Pays-Bas.
Monsieur le ministre, si je souscris aux objectifs de votre amendement, je propose de le compléter par trois sous-amendements.
Le sous-amendement n° 200 traite de la question des cadavres d’équidés. Si les structures professionnelles organisées, comme il en existe dans la filière bovine, ont pu être réunies dans une interprofession, il n’en est pas de même dans la filière équine. Je propose donc que le traitement du cheval reste du domaine du service public.
Comment gérer autrement le cas de l’agriculteur retraité, passionné de chevaux, qui conserve dans son exploitation une ou deux juments ? Si l’un des animaux crève, nous ne pouvons pas laisser l’agriculteur seul, confronté au coût qui en découle.
Monsieur le ministre, peut-être pourriez-vous considérer l’amendement n° 200 comme un amendement d’appel. D’autres solutions que celle-là sont peut-être envisageables. Il faut, en tout cas, les mettre en œuvre.
Le sous-amendement n° 206 rectifié s’inspire d’expériences européennes, et en particulier de l’expérience allemande. Il donne la possibilité aux exploitations de traiter sur place un certain nombre de cadavres, sous réserve que les conditions sanitaires soient parfaitement réunies et que, en conséquence, les traitements en question soient reconnus et agréés par l’administration. La taille des élevages ayant augmenté, il s’agit sans doute d’une solution d’avenir, d’autant que les plus petits d’entre eux pourraient se regrouper – pourquoi ne créeraient-ils pas des CUMA ?
Enfin, l’amendement n° 201 rectifié tente de faire évoluer la situation actuelle d’oligopole qui prévaut, sur le territoire national, en matière d’équarrissage. Pourquoi ne pas imaginer que des entreprises de l’agroalimentaire, par exemple, prennent des initiatives en la matière ? Cela permettrait de diminuer considérablement les coûts.
Monsieur le ministre, les trois sous-amendements que je viens de présenter sont de nature à perfectionner le dispositif que vous nous proposez. En tout état de cause, j’espère que la concertation que vous avez su mener et que l’ouverture dont vous avez fait preuve nous permettront d’en finir avec un débat récurrent depuis 1997.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les trois sous-amendements de M. Le Fur ?
M. Bruno Le Maire, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du plan pour la sécurité alimentaire. La commission des finances n’a pas examiné ces sous-amendements. J’exprime donc, à leur sujet, un avis personnel.
Le sous-amendement n° 200 soulève une question importante. Une différence réelle existe bien entre le coût de traitement des cadavres d’équidés – 250 euros par tonne – et celui des cadavres de ruminants – 113 euros par tonne. Il faut aussi tenir compte des propriétaires qui ne conservent qu’un cheval ou deux.
M. Michel Vergnier. S’ils sont deux, ce sont des chevaux !
M. Bruno Le Maire, rapporteur spécial. Vous avez raison, monsieur Vergnier. Méfiez-vous des agrégés de lettres : en général, ils parlent mal le français. (Sourires.)
Cependant, monsieur Le Fur, je reste très attaché au respect du principe de l’intérêt général, et je ne suis pas partisan de multiplier les exceptions dans le domaine législatif. Si nous commençons à accepter un traitement différencié par type d’animal, alors adieu veaux, vaches, cochons… En respectant le sens de l’intérêt général, le ministre de l’agriculture doit trouver une solution qui ne fasse pas de différences entre les divers types d’animaux. Je ne suis donc pas favorable au sous-amendement n° 200.
En revanche, j’émets un avis très favorable sur le sous-amendement n° 206 rectifié. Les éleveurs doivent pouvoir, en effet, disposer d’un outil de traitement des cadavres qui soit agréé. J’insiste sur le caractère précis et exact du terme « agréé » qui remplace, après rectification du sous-amendement, le mot « reconnu ». En Normandie, les éleveurs qui possèdent un cheptel nombreux, parfois jusqu’à 500 bêtes, pourraient ainsi s’équiper de leur propre dispositif d’équarrissage, ou s’organiser avec leurs voisins pour mutualiser leurs ressources et créer un système d’équarrissage autonome. À partir du moment où le dispositif est officiellement agréé – j’y reviens, car je suis rapporteur spécial pour la sécurité alimentaire –, je pense que la solution est bonne, tant sur le plan économique que sanitaire.
Le transfert du service public de l’équarrissage vers les filières professionnelles, proposé par le sous-amendement n° 201 rectifié, permettrait à l’État, comme aux éleveurs, dont nous savons tous à quelles difficultés ils sont confrontés aujourd’hui, de faire des économies. En renforçant la concurrence, en permettant à certaines zones géographiques de disposer de leur propre système d’équarrissage, nous favoriserions une réduction des coûts. Je voudrais toutefois que le ministre de l’agriculture nous donne l’assurance que, dans ce cas, un coût-plafond d’équarrissage sera bien fixé pour l’ensemble du territoire national afin d’éviter de trop grandes disparités. Sous réserve de cette précision extrêmement importante, qui évitera que certains ne bénéficient d’un coût très faible tandis que d’autres seraient soumis à des prix exagérément élevés, j’émets un avis favorable au sous-amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les trois sous-amendements ?
M. Michel Barnier, ministre de l’agriculture. Tout d’abord, je remercie Marc Le Fur pour l’esprit très constructif dans lequel nous avons travaillé avec lui et d’autres députés, ici présents, afin d’aboutir à un dispositif raisonnable, stable et durable.
Comme M. Le Maire, je ne suis pas favorable au sous-amendement n° 200. Le maintien des équidés dans le service public se traduirait par l’obligation pour l’État de passer un marché public spécifique, ce qui n’est pas prévu aujourd’hui. En outre, il est difficile d’identifier les éleveurs et les propriétaires amateurs. Cette situation rend très délicate une organisation collective de cette filière qui permette de maîtriser les coûts et gêne la recherche d’une solidarité entre les différentes formes d’élevage. En effet, certains éleveurs n’ont pas besoin d’être aidés, alors que d’autres, que je rencontre tous les jours sur le terrain, méritent de l’être, notamment les éleveurs de chevaux de trait.
Je souhaiterais donc, monsieur Le Fur, que vous retiriez ce sous-amendement, afin de nous donner le temps de travailler avec la filière pour identifier les éleveurs professionnels équins – c’est notamment le cas des agriculteurs retraités. Il s’agit de leur permettre d’intégrer le système collectif que nous mettons en place dans la filière ruminants et de bénéficier ainsi de la mutualisation des coûts, au même titre que les autres secteurs de l’élevage. Cette évolution serait, me semble-t-il, de nature à répondre aux inquiétudes que vous avez exprimées en relayant les préoccupations de la filière équine.
Sur les sous-amendements nos 206 rectifié et 201 rectifié, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée. Je précise à Bruno le Maire que le dispositif que nous proposons doit permettre une régulation et éviter des coûts différenciés selon les régions.
M. le président. La parole est à M. Michel Vergnier.
M. Michel Vergnier. Monsieur le rapporteur de la commission des finances pour la sécurité alimentaire, méfiez-vous des maîtres d’école de la République laïque : ils sont particulièrement pointilleux sur l’orthographe et la grammaire ! (Sourires.)
M. Bruno Le Maire, rapporteur spécial. Vous avez raison !
M. Michel Vergnier. Monsieur le ministre, je profite de ce débat sur l’équarrissage pour vous interroger sur le problème des farines animales. J’étais, comme vous le savez, le rapporteur de la commission d’enquête sur l’ESB, dont les conclusions sont aujourd’hui confirmées. En effet, ayant identifié les farines animales infectées comme étant responsables de l’ESB et de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, nous avions prévu que les cas d’ESB, donc de Creutzfeldt-Jakob, diminueraient considérablement au fil du temps, même si la période d’incubation est de vingt-cinq ans.
Je souhaiterais donc que vous nous indiquiez si les farines à haut risque continuent d’être détruites dans les cimenteries et s’il existe encore des stockages importants de farines dites à bas risque. Si tel est le cas, pouvez-nous préciser leur coût pour le budget de l’État car, selon mes informations, il ne serait pas neutre ?
M. le président. La parole est à M. Daniel Boisserie.
M. Daniel Boisserie. Je me réjouis que les enseignants soient devenus des spécialistes de l’élevage au fil des années. (Sourires.)
Monsieur le ministre, je m’inquiète de vos propositions concernant l’équarrissage. Si je salue le travail accompli par votre ministère – car je sais que votre tâche est très difficile –, j’ai du mal à vous croire lorsque vous affirmez que le nouveau dispositif entraînera une économie de 25 % pour les agriculteurs. En effet, l’aide de l’État est supprimée. Le produit de la taxe d’abattage sera utilisé, mais je souhaiterais, pour ma part, que cette taxe puisse être réduite, car les abatteurs et les abattoirs sont en difficulté. Quoi qu’il en soit, je pense que cette réforme se traduira par une augmentation importante du coût pour les éleveurs, et cela m’inquiète.
Ce week-end, j’ai vu un jeune agriculteur en pleurs. Non pas parce que, cette année, son bénéfice est inférieur à celui de l’année dernière, mais parce que, en raison de la fièvre catarrhale, il ne peut expédier ses animaux. Ceux-ci sont donc considérés comme du stock qui, en tant que résultat, est imposable. Or il n’a plus de trésorerie. Les éleveurs, notamment les jeunes, sont ainsi dans une situation extrêmement délicate, monsieur le ministre, et je tenais à vous en alerter.
Par ailleurs, je crains qu’il n’y ait des disparités entre territoires. Je souhaiterais donc que vous nous confirmiez qu’un tarif unique sera bien appliqué sur l’ensemble du territoire et que, pour les éleveurs, le nouveau dispositif représentera bien une économie.
M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.
M. André Chassaigne. Monsieur le ministre, quoi qu’on en dise, votre mesure se traduira, au final, par un coût supplémentaire pour les éleveurs ; c’est la réalité. Or ceux-ci vivent déjà une situation extrêmement difficile et je crains qu’en l’aggravant encore, on ne compromette le maintien de l’élevage dans certaines zones.
Le problème de l’équarrissage est, c’est vrai, une patate chaude que se passent les ministres de l’agriculture successifs depuis quatre ou cinq ans : chaque année, nous débattons de ce problème. Je peux donc saluer les propositions qui ont été faites et qui visent à améliorer les conditions d’élevage, à valoriser les sous-produits animaux, à généraliser les structures collectives et à constituer à terme une association unique pour l’ensemble de la filière de l’élevage – ce qui signifie que les différents types d’élevage seraient regroupés dans une seule filière.
Mais les sous-amendements de M. Le Fur risquent de remettre en cause la péréquation. Prenons l’exemple du sous-amendement n° 206 rectifié : il est bien évident que ce sont les éleveurs qui ont les plus grandes exploitations et les moyens les plus importants qui pourront s’équiper pour le traitement des cadavres. Cela se fera donc au détriment des plus petites exploitations et portera atteinte à une forme de péréquation, qui ne doit pas être seulement géographique, mais aussi verticale en fonction de la taille de l’élevage.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Chassaigne.
M. André Chassaigne. Je regrette ce nouveau désengagement de l’État, qui se traduira par des coûts supplémentaires pour les agriculteurs, et je pense qu’il faut se méfier de sous-amendements que je qualifierai de pervers.
M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.
M. Jean Gaubert. Monsieur le ministre, sur un sujet aussi complexe, personne n’a de certitude. Si j’ai bien compris, il s’agit de maintenir une forme d’unicité, en tout cas un dispositif « bordé » au niveau national. Mais, dès lors que vous prévoyez de supprimer, pour certains secteurs, le service public de l’équarrissage, je ne vois pas comment vous pourrez empêcher n’importe quel opérateur d’exercer cette activité. Au reste, M. Le Fur en tire les conclusions, en proposant d’autoriser chaque éleveur à s’équiper pour le traitement des cadavres. Pourquoi une coopérative agricole, par exemple, ne pourrait-elle pas fournir le service d’équarrissage à ses adhérents, d’autant que les éleveurs devront pouvoir attester qu’ils ont conclu un contrat pour ce service ? La situation est donc très compliquée, car la suppression du service public fait s’écrouler tout l’édifice.
S’agissant du sous-amendement n° 200, je suis d’accord avec vous, monsieur le ministre. Je connais également de nombreux éleveurs de chevaux, notamment une qui siège souvent derrière moi dans cet hémicycle : ils doivent assumer leurs responsabilités d’éleveurs.
Je suis également très réservé sur le sous-amendement n° 206 rectifié. Tout d’abord, je me demande dans quelle mesure cette disposition, qui permet à des éleveurs de s’équiper en vue du traitement des cadavres, sera opérationnelle. En effet, la réputation des animaux morts n’étant pas très bonne, cette mesure risque de compliquer davantage encore l’installation et le développement des élevages, qu’il est déjà très difficile aujourd’hui de faire accepter. Je ne suis pas sûr que la méthode chinoise soit adaptée à certaines régions.
M. le président. La parole est à M. Michel Barnier, ministre de l’agriculture.
M. Michel Barnier, ministre de l’agriculture. Il s’agit d’une question compliquée, qui est pendante depuis un certain temps. Je souhaiterais donc que nous puissions trouver un point d’équilibre qui permettra, sur la base de l’amendement du Gouvernement, de mettre les choses en route. Comme je l’ai dit tout à l’heure, monsieur Gaubert, je suis partisan de l’évaluation. Je propose donc que l’on engage le processus – car nous avons beaucoup travaillé – et que l’on procède ensuite à une évaluation du dispositif pour voir s’il fonctionne.
Certains d’entre vous ont exprimé des inquiétudes à propos de la baisse des coûts. Nous avons observé une baisse lors des deux premières étapes ; nous espérons qu’elle se reproduira. Il y a la récupération de la TVA. Encore une fois, nous évaluerons le dispositif, mais il me semble que nous devons aller au bout de cette réforme.
Celle-ci vise également à créer davantage de concurrence, en encourageant les interprofessions à s’organiser afin de discuter avec les professionnels ou les entreprises dans de meilleures conditions. Ce sont ces associations interprofessionnelles qui vont passer les marchés. Il pourrait ainsi y avoir un marché national, voire des marchés régionaux, qui veilleront, non pas à établir un tarif unique, mais à respecter un équilibre. Nous avons les outils pour y parvenir et éviter trop de disparités.
S’agissant de l’ESB, monsieur Vergnier, j’ai bien relu les rapports sur le sujet, notamment ceux de l’Assemblée nationale. Dans le cadre de la politique volontariste du Gouvernement en matière d’élimination des farines animales – farines qui seront déstockées et détruites intégralement en 2010 –, les opérations de déstockage se sont accélérées en 2007. Les cinq derniers sites sont en cours de déstockage et, depuis le 1er janvier 2008, 270 000 tonnes supplémentaires de farines ont été détruites dans les cimenteries. Un tonnage équivalent devrait être vidé des entrepôts entre 2009 et 2010, date prévue pour la fin des opérations. La hausse du coût de l’énergie a entraîné une réfaction du coût du traitement des farines, qui constituent, je le rappelle en passant, un carburant d’appoint pour les cimenteries.
Par ailleurs, je suis également préoccupé par la tremblante classique ovine, qui touche certains élevages et qui a des conséquences sur la production de lait. Je travaille d’ailleurs sur un règlement communautaire sur ce sujet.
Enfin, mesdames et messieurs les députés, avant de vous proposer de voter l’amendement du Gouvernement sous-amendé par deux sous-amendements sur lesquels j’ai fait appel à la sagesse de votre assemblée, je voudrais dire deux choses.
Premièrement, nous maintenons en 2009 les crédits de l’État à hauteur de 44 millions d’euros, même si un ajustement doit avoir lieu ultérieurement pour nous adapter à la mise en œuvre de cette nouvelle organisation.
Deuxièmement, je voudrais faire une dernière proposition, à laquelle votre assemblée sera certainement sensible. Compte tenu du problème général de revenus auquel sont confrontés les éleveurs, que plusieurs d’entre vous ont évoqué, je souhaite que le Gouvernement trouve en 2009 les moyens de prendre à sa charge la dette des éleveurs sur le système d’équarrissage, s’élevant à 11 millions d’euros ; c’est l’une des propositions que je soumettrai au Premier ministre dans le cadre de la conférence du 12 novembre sur les revenus de l’agriculture et des éleveurs.
M. Marc Le Fur. Très bien !
M. Michel Barnier, ministre de l’agriculture. Je prends par conséquent l’engagement de ramener à zéro la dette des agriculteurs, afin de leur permettre de commencer à travailler dans le cadre du nouveau système d’équarrissage sur des bases saines. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.
M. Marc Le Fur. Je veux dire à M. Chassaigne que je comprends sa position ; cependant, il me semble que maintenir la situation de l’offre dans le domaine de l’équarrissage aurait pour conséquence de conforter le duopole d’entreprises de type CAC40 qui domine le secteur. Il convient, au contraire, de permettre à d’autres entreprises de s’installer.
Par ailleurs, afin de simplifier les choses et de remercier ainsi le Gouvernement, qui accomplit des efforts considérables en faveur des agriculteurs – j’en veux pour preuve l’information essentielle que vient de nous donner M. le ministre –, je retire le sous-amendement n° 200 relatif aux équidés.
(Le sous-amendement n° 200 est retiré.)
M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.
M. Jean Gaubert. Mes collègues et moi-même ne voterons pas le deuxième sous-amendement de M. Le Fur pour les raisons que j’ai exposées tout à l’heure ; en revanche, nous voterons le troisième. Pour ce qui est de l’amendement n° 157 du Gouvernement, nous nous abstiendrons, non par défiance, mais parce que nous n’avons pas eu le temps d’expertiser de manière approfondie ce texte relativement complexe.
(Le sous-amendement n° 206 rectifié est adopté.)
(Le sous-amendement n° 201 rectifié est adopté.)
(L’amendement n° 157, sous-amendé, est adopté.)
M. le président. Les groupes SRC et GDR se sont abstenus sur le vote du sous-amendement n° 157.
Je suis saisi d’un amendement n° 266.
La parole est à M. le ministre.
M. Michel Barnier, ministre de l’agriculture. L’amendement n° 266 vise à répondre aux préoccupations exprimées par certains députés, notamment M. Le Fur, sur la question du prix du lait, qui se trouve au cœur de la crise que traverse actuellement l’élevage. Comme je l’ai déjà indiqué, nous nous sommes employés à recréer au niveau national l’encadrement de la négociation libre et privée entre producteurs et industriels, tout en confortant l’interprofession laitière, qui joue un rôle essentiel et à qui j’adresse, à ce titre, les remerciements du Gouvernement. J’espère que les différentes parties trouveront, dans les jours qui viennent, un accord de prix équitable et satisfaisant pour les producteurs de lait.
Je suis conscient de la nécessité d’adresser un signal en direction des acteurs de la filière laitière. Comme je l’ai dit, Mme Lagarde, M. Chatel et moi-même avons travaillé sur le statut juridique de l’organisation interprofessionnelle laitière. Aujourd’hui, il semble utile, au moins sur le plan symbolique, de conforter et de clarifier la situation juridique de cette organisation en apportant une plus grande visibilité aux opérateurs de la filière, de façon à garantir la qualité des produits et la stabilité des prix dans l’intérêt des consommateurs. Cela passe notamment par l’encouragement des relations contractuelles entre les opérateurs de la filière que sont les producteurs et les transformateurs. Tel est l’objet de l’amendement que je vous propose au nom du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Nicolas Forissier, rapporteur. La commission n’a pas pu examiner cet amendement. À titre personnel, je suis très favorable à cette proposition qui constitue un signe fort de nature à conforter notre filière laitière, notamment au travers du CNIEL et des centres régionaux interprofessionnels de l’économie laitière.
M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.
M. Marc Le Fur. Un certain nombre de députés souhaitaient déposer cet amendement, ce qu’ils n’ont malheureusement pas pu faire pour des raisons de procédure. Je remercie par conséquent M. le ministre d’avoir accepté de le présenter au nom du Gouvernement.
La filière laitière vit des jours très difficiles, et je puis vous assurer que cet amendement sera considéré avec la plus grande attention dans nos campagnes. Hier encore, la réunion visant à trouver un accord sur le prix du lait s’est soldée par un échec. Les agriculteurs de nos départements attendent de nous que nous rendions possible, par la loi, la détermination du prix du lait – ce qui revient à soustraire la formation de ce prix à l’application des articles L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce. Une lettre de la DGCCRF du printemps dernier avait largement contribué à compliquer la situation en se prononçant pour une dérégulation du marché.
L’amendement du Gouvernement nous offre la chance de sortir de cette période de confusion pour revenir à des principes de régulation positive auxquels nous sommes tous favorables. L’adoption de cette proposition doit nous permettre de définir à nouveau des indices servant de base à la détermination d’un prix de référence pour les vendeurs et les acheteurs, sans que ceux-ci se rendent coupables d’une distorsion de concurrence.
Il est indispensable que nous adoptions cet amendement. Je vous remercie à nouveau, monsieur le ministre, de nous avoir aidés à apporter une solution aux producteurs laitiers. Les éleveurs nous seront, je crois, reconnaissants de la décision que nous nous apprêtons à prendre.
M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.
M. Jean Gaubert. Je veux dire à M. le ministre que nous allons voter cet amendement afin que la situation que connaissent les producteurs laitiers puisse se débloquer. Cependant, ne nous y trompons pas : ce n’est pas cela qui va faire monter le prix du lait ! Nous allons voter cet amendement par cohérence, parce que nous étions en désaccord avec l’esprit de la LME sur un certain nombre de points, notamment l’obtention d’une baisse des prix au moyen de la concurrence : une concurrence accrue se traduit par une plus grande pression exercée sur les industriels puis, par répercussion, sur les éleveurs. La régulation – dont il a beaucoup été question ces jours-ci à Bruxelles – est nécessaire, notamment sur le marché du lait, et nous estimons qu’il convient d’aller dans ce sens.
M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.
M. André Chassaigne. Je voterai, moi aussi, cet amendement qui va dans le sens de la régulation.
Cependant – et en dépit des reproches récemment formulés au sujet du niveau de dépenses de l’Assemblée –, je voudrais proposer que chaque député soit équipé d’une balayette et d’une petite pelle en plastique. Quand on fait de la casse, il faut ramasser les débris ! Je peux vous dire qu’après l’adoption d’une série de décisions tendant à supprimer les possibilités de négociation sur les prix – je pense en particulier à la loi de modernisation de l’économie –, vous allez être très occupés ! Vous pouvez d’ores et déjà vous apprêter à réparer, en restaurant la régulation, les dégâts occasionnés dans de nombreux domaines. Vous regretterez alors certainement d’avoir proclamé qu’il ne fallait aucune contrainte, qu’il fallait aller vers la libéralisation et vers la suppression des conditions générales de vente. La situation de la filière laitière n’est que l’un des exemples démontrant la nécessité d’avoir un État présent et de pouvoir disposer d’indications en termes de prix.
(L’amendement n° 266 est adopté.)